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Raison de la mise en attente :
LES CAMPS DE LA MORT ANTIFASCISTES

LE MONDE CONCENTRATIONNAIRE SOVIETIQUE

« Des droits égaux à ceux de l’homme sont accordés à la
femme en U.R.S.S. dans tous les domaines. »
(Article 122 de la Constitution de l’U.R.S.S.)

UNIFORMES rutilants, autostrades grandioses, parades militaires puissantes, disparition totale du chômage, maisons ouvrières toutes neuves. Images du IIIe Reich. Mais aussi l’envers du décor, la chasse à l’opposant, les chiens policiers dressés à dévorer le pourchassé, les chambres à gaz, les fosses communes où l’on empile les cadavres par rangées de 5 sur 12 mètres de long, jusqu’au jour ou le crématoire efface les traces du crime.

D’un côté, les buffleteries reluisantes, les SS aux bottes vernies, la Wilhelmstrasse, les pactes, les honorables représentants de la démocratie française et anglaise capitulant honorablement devant M. Hitler. 1938. Pendant ce temps la vie moyenne d’un détenu concentrationnaire était de 3 à 5 ans. Au bout, la mort. 1938. A des milliers de kilomètres de l’honorable M. Hitler vivait le non moins honorable M. Staline. Avec ses diplomates dorés sur tranche, son armée bien dressée, ses uniformes confortables, ses casquettes bien plates, ses usines toutes neuves, ses maisons ouvrières, ses statistiques triomphantes, et ce que n’avait pas Hitler : l’approbation des bien-pensants de la démocratie. U.R.S.S. 1938. Avec aussi ses chiens anthropophages, ses convois de wagons hermétiquement clos, son humanité concentrationnaire pouilleuse, ses cadavres le long des pistes sibériennes. Pour chaque traverse de la ligne du Congo, jadis un nègre. Pour chaque traverse de la ligne double du Transsibérien un blanc, un jaune, un Russe, un Mongol, un Koulak et un Nomade. Le socialisme avance. Le socialisme écrase. Et tant de morts autour de lui que l’air en est empesté et que lui-même en crève.

L’univers concentrationnaire hitlérien a volé en éclats. Et tous les honorables diplomates qui serrèrent la main de M. Hitler s’aperçurent, avec dégoût, qu’ils avaient les mains sales. L’univers concentrationnaire stalinien existe toujours. Et les partenaires de Staline lui envoient des télégrammes le jour de son anniversaire.

La guerre des démocraties contre le fascisme n’est pas encore terminée.

Origine des témoignages

L’analogie entre le système contrationnaire de l’U.R.S.S. et celui de l’Allemagne hitlérienne est tellement saisissante que l’on a parfois l’impression d’un plagiat. Et il est bien vrai que les maîtres policiers de la Gestapo avaient étroitement copié l’organisation et les méthodes de la Guépeou. On s’apercevra aussi, au fur et à mesure du déroulement des témoignages qui vont suivre, que la bête totalitaire est partout la même : aussi féroce, aussi stupide, aussi venimeuse en U.R.S.S. que dans le IIIe Reich.

Avant de donner la parole aux témoins oculaires, nous dirons dans quelles circonstances leur témoignage a pu arriver jusqu’à nous. Le procès Kravchenko, si impudemment provoqué par les valets de plume du stalinisme, a déjà fourni bien des précisions sur le monde concentrationnaire et nous nous référerons aux écrasantes dépositions des témoins de M. Kravchenko. Mais la personnalité de celui-ci est si curieuse et la propagande soviétique si habile qu’il est des gens de bonne foi pour prêter créance aux calomnies et fielleuses accusations lancées contre les témoins et M. Kravchenko lui-même. Nos témoins sont irréprochables, pour la plupart modestes gens du peuple et leur seul crime fut de n’être pas Russes. Car la politique stalinienne est raciste autant que l’hitlérienne et la déportation tout entière d’un peuple est causée, souvent, par sa simple nationalité. Nous aurons occasion de revenir sur ces déportations massives, caractéristiques de tout système concentrationnaire. A l’accoutumé la Guépéou opère avec une telle science, que ce n’est que bien des années plus tard que l’événement parvient a la connaissance du monde. Les victimes n’ont pas l’occasion de conter où, quand, comment l’enlèvement de tout un peuple s’est effectué. De rares individus seuls subsistent et quelques unités seulement parviennent à gagner l’étranger. Le souci de leur sécurité les contraint au silence et si leur courage va jusqu’à raconter leurs souffrances et celles de leurs amis, il y a toujours des « écrivains » à gage pour les diffamer et des tueurs pour les exécuter.

Que peut un Wan Lapchina quelconque contre une Guépéou qui a réussi à tuer un Trotsky et un Krivitsky ? (1)

Et puis, un beau jour, un miracle s’est produit. Pour la première fois dans l’histoire de la Russie concentrationnaire les camps se sont ouverts. Par centaines de mille les victimes ont vu tomber leurs chaînes.

Les chefs des bourreaux mirent un avion personnel, une voiture luxueuse, tous les moyens de communiquer avec le monde au représentant le plus éminent des victimes. Celles-ci accoururent de tous les points de l’U.R.S.S., se rassemblèrent, se racontèrent leur odyssée mutuelle, se félicitèrent d’avoir survécu et comptèrent leurs morts.

Pendant ce temps, Staline souriait dans sa moustache de bon papa et s’attendrissait lui-même à la pensée de sa clémence. Il attendait le vif élan de reconnaissance des esclaves à qui il avait fait grâce de la vie. Qu’en 1939, la Guépéou eût procédé à la déportation de 1.600.000 Polonais de la Pologne orientale annexée, qu’en 1941 il en restât à peine le tiers, qu’était-ce au regard de la tâche glorieuse qui incombait aux rescapés de la mort concentrationnaire : tomber sur les champs de bataille pour la plus grande gloire de l’U.R.S.S. ?

Mais les « amnistiés » n’avaient que la peau sur les os et il leur fallut des mois pour reprendre le souffle. Il leur en fallut davantage encore pour former une armée. Et, pendant ce temps, la Guépéou comprenait l’erreur commise. Des survivants des camps de la mort en liberté ! Protégés par un gouvernement installé à l’étranger, par des traités, des accords, des contrats. Des gens qu’on ne pouvait plus enlever, séquestrer, torturer, exploiter jusqu’au sang. Des gens qui allaient parler, s’inquiéter des morts, chercher les disparus, demander des comptes. Si bien qu’un jour le contrat fut violé, les accords rompus, l’armée en formation contrainte au départ rapide, sous peine de voir ses effectifs reprendre la vie concentrationnaire. Le Polonais martyr était autant que le nazi, sinon plus, l’ennemi n° 1 de l’U.R.S.S. Mais nous savons, maintenant, très exactement comment naît, vit, se développe le monde concentrationnaire soviétique. Plus de 100.000 individus, orphelins, ou veufs, ou meurtris dans leur chair, ou privés à jamais d’un ami, peuvent témoigner devant le monde. Les phraseurs des Conférences internationales ne peuvent plus s’abriter derrière leur ignorance prétendue. Une armée d’esclaves parle.

C’est leur témoignage que l’on trouvera ici. Le service des recherches de l’Armée Polonaise a réuni tous les renseignements permettant de suivre à la trace un tel de Lodz, X... de Wilno, tel autre de Cracovie jusqu’au jour ou sa trace se perd dans l’immensité des camps de la mort. En même temps chacun contait sa propre expérience. Des milliers de dossiers attendent la curiosité des enquêteurs internationaux. C’est parmi ceux-là que nos témoignages ont été pris. Ils sont à la disposition de qui veut les contrôler (2).

Un mot pour finir : incapables de réfuter les témoignages produits, les autorités soviétiques ont accrédité la légende du « fascisme » de l’Armée Anders. Nombre de « fascistes » polonais étaient présents dans le ciel de Londres et abattaient les avions nazis quand l’U.R.S.S. ravitaillait la Wehrmacht. Les fascistes polonais se battaient dans les sables d’Afrique quand Molotov était à Berlin où Ribbentrop lui offrait les Indes. Les « fascistes » de l’armée Anders prenaient le Mont Cassin tandis que l’Armée Rouge restait l’arme aux pieds devant Varsovie insurgée sur ses conseils. Et c’étaient les amis de l’armée Anders qui se faisaient tuer dans une lutte sans espoir parce que l’U.R.S.S. refusait ses bases aux avions anglais parachutant des armes sur Varsovie. Front britannique — front de l’insurrection polonaise : 950 kilomètres. Front soviétique — front de l’insurrection polonaise : 10 kilomètres. La collaboration germano-soviétique contre la Pologne se poursuivait même pendant la guerre des deux totalitarismes.

Les chefs responsables du système concentrationnaire soviétique sont bien venus de traiter leurs victimes de « fascistes ». Ici, en France, les Socialistes ont toujours été du parti des victimes contre les bourreaux. Et notre reconnaissance ira toujours à ceux qui, refusant de s’incliner devant la violence, nous disent : « Prenez garde. Nous aussi nous disions : ils ne feront pas ça chez nous ! »

Entrée dans le monde concentrationnaire soviétique

En U.R.S.S., comme dans tout régime policier et plus que dans tout autre sans nul doute, la police fait ce qu’elle veut. On a vu, au cours des pages précédentes, l’omnipotence de la police. Reste à parler de ses méthodes. Celles-ci n’ont rien à envier aux pires méthodes de la police capitaliste. La « libération de l’homme par le socialisme » a oublié le policier sur son passage. Le policier soviétique a la même déformation professionnelle que le policier au service de la bourgeoisie : en tout inculpé il voit un présumé coupable. Il faudra donc que le « coupable » avoue et, pour ce faire, tous les moyens sont bons.

« Pendant deux mois, je fus enfermé dans une sorte de cave, une petite cellule, avec six ou sept détenus, — le nombre changeait, — et c’est ce que, en langage N.K.V.D., on appelle la période de deux mois, la « période de travail sur le prévenu ». En effet, il s’agit de placer le « nouveau » parmi des gens qui sont emprisonnés depuis quelque temps et qui sont passés par tout le système des interrogatoires, qui reviennent dans la cellule roués de coups et qui, là, deviennent même souvent fous.
« Je suis un sportif, mais au bout de deux mois j’avais perdu suffisamment de forces pour que l’on pût commencer le travail sur moi. Je fus accusé d’être membre d’une association de trotskystes et d’amis de Boukharine, contre-révolutionnaires, dont le but était de renverser le gouvernement soviétique, avec Staline en tête.
« Par deux fois, j’ai été battu jusqu’à en perdre connaissance, mais la carafe d’eau servait à me ranimer. Malgré tout, je refusai de signer la déposition qui avait été signée par le procureur. On me mit alors sur la vis sans fin, c’est-à-dire qu’on me soumit à cet interrogatoire qui se prolonge indéfiniment.
« Après avoir été battu comme je viens de le dire, je fus engagé sur un tapis roulant. Je crois que l’Inquisition médiévale n’a pas connu ce genre de méthode. Cela consiste à vous asseoir sur un tabouret placé à un demi-mètre du mur, de telle façon que vous ne reposez que sur l’angle de ce tabouret et que tout le poids de votre corps repose sur la colonne vertébrale, laquelle doit être gardée droite pendant que les mains reposent sur les genoux. (Le témoin esquisse la position.) Dans cette situation, je fus forcé de passer quatorze jours sans sommeil. Quatre personnes m’interrogeaient, qui se relayaient toutes les quatre heures, et lorsque le juge d’instruction était irrité, il me battait et m’outrageait, mais l’essentiel était que je gardasse bien la même position et que je ne m’endorme pas.
« Etant donné la situation, et voulant au plus tôt quitter ce monde, je signai le procès-verbal où je reconnaissais avoir été membre de l’organisation trotskyste-boukharinienne, dont le but était de renverser le gouvernement soviétique. Cela m’était d’ailleurs complètement égal.
« Alors, ils reprirent leurs tortures afin que je fasse une fausse déclaration concernant l’agitation à laquelle je m’étais livré et toutes mes manœuvres contre le régime soviétique. » (3)

« Un professeur de l’école technique est enfermé par ordre du Guépéou. Je le connais bien. Je sais que l’homme ne cédera pas. Un jour enfin, il revint parmi nous. Son visage disait assez par quelles épreuves terribles il avait passé. Je le regarde longuement sans oser rien lui demander, mais dans ses yeux, je lis la vérité ; il est demeuré fort, il n’a pas cédé. Plus tard, il me raconte comment on l’a tenu sous pression. Il était réveillé au milieu de la nuit, interrogé des heures durant. On fut toujours extrêmement poli à son égard. Mais on enfermait avec lui dans sa cellule des sujets plus ou moins douteux qui devaient l’influencer. Il dut passer plusieurs jours et plusieurs nuits dans une cellule entièrement peinte en blanc, sans fenêtre, et où sans cesse brillait au plafond une lampe de quelques centaines de bougies. Il ne devait pas dormir, on l’obligeait à rester éveillé. « Je priais Dieu de me rendre aveugle, ç’eût été un grand bienfait. » Il ne se plaint pas. Du temps du tsar, on agissait de même. C’était un peu m’oins raffiné, mais tout aussi grave. Il s’étonne seulement qu’on ne le connaisse pas mieux. » (4)

« Le 1er décembre 1939, je m’enfuis de Varsovie pour me dérober aux persécutions et aux cruautés des Allemands envers les Juifs. Je quittai ma mère, un fils de quatorze ans, ma femme et tous mes parents. Le 10 décembre de la même année, j’arrivai à Léopold. Le 14 janvier, je fus arrêté.
« Chacun de nous était introduit dans un bureau séparé, pour l’enquête préliminaire. Ils me soumirent à un interrogatoire d’identité, et une fois le procès-verbal signé, ils commencèrent à me battre en disant que tout ce que j’avais déclaré était faux et calomnieux. Ils affirmèrent posséder un document écrit par moi et ils me le montrèrent, sans me le faire lire, avec des photographies d’un homme que je voyais pour la première fois de ma vie : ils soutenaient que tout ce que j’avais affirmé au cours de l’interrogatoire n’était pas vrai, que j’étais un officier déguisé et qu’ils possédaient des preuves de tout cela. Comme je niais, ils recommencèrent à me battre, jusqu’à ce que je tombai par terre ensanglanté ; ils ouvrirent alors la porte et me jetèrent dans le couloir d’où je fus transporté dans une chambre où je restai tout seul. À 2 heures de la nuit, ils m’emmenèrent de nouveau dans la chambre précédente, ils s’excusèrent, disant qu’ils s’étaient trompés à mon égard, mais ils ajoutèrent qu’ils possédaient des preuves irrécusables, qu’ils me montreraient, d’après lesquelles j’étais un espion de la Gestapo ; ils me demandèrent quelle était la mission qui m’avait été confiée, m’imposant de dire la vérité, sinon, avec les preuves qu’ils possédaient, ils me fusilleraient.
« Je répondis que j’étais un Juif, échappé de la Gestapo de Varsovie, et que j’avais laissé ma famille dans cette ville. Je fis cette déclaration en pleurant. Je fus néanmoins de nouveau battu et on me déclara : « Nous te prouverons le contraire. » Ils me renvoyèrent ensuite de la chambre comme un chien et m’enfermèrent dans la même chambre qu’auparavant. » (702 — H. A., commerçant de Varsovie). » (5)

« ... J’ai été maître d’école élémentaire dans le village de J. Le 11 mars 1941, je fus arrêté et conduit au bureau de l’N.K.V.D., dont le chef commença à m’interroger. Il m’engagea à confesser spontanément les fautes commises contre l’autorité soviétique, sans toutefois les énumérer. N’ayant obtenu de moi aucune déclaration, après quelques heures d’interrogatoire, il appela le juge d’instruction auquel la suite de l’enquête fut confiée. Celle-ci dura sans interruption jusqu’à 8 heures, le 12 mars. Je fus obligé d’avouer des fautes pas même formulées par les accusateurs. Je ne savais pas quoi confesser. Pour m’encourager à parler, ils m’obligèrent à rester debout pendant des heures, « pour que je ne m’ennuie pas en restant assis ».
« À 4 heures du matin, le juge m’ordonna d’écrire mon « curriculum vitæ ». Quand je l’eus écrit, il m’ordonna d’en préparer un deuxième, et ainsi de suite, jusqu’à 8 heures du matin. Je ne sais pas combien de copies je fus obligé de rédiger. À 8 heures, le juge fut remplacé par un autre enquêteur et l’interrogatoire continua, sans interruption pour le repos ou le repas, jusqu’à 8 heures du soir ; à cette heure-là, le juge précédent revint et recommença à m’interroger. Le lendemain à midi, je fus emmené dans un autre bureau, où se trouvaient le chef de l’N.K.V.D. et d’autres personnes, et l’interrogatoire continua. Nombre d’accusations justifiées ou injustes : trahison de la « Patrie », participation aux luttes de l’année 1920, collaboration avec la police, activité dans les organisations politiques, etc. Comme l’interrogatoire ne donnait pas les résultats désirés, je fus de nouveau livré au juge d’instruction précédent, qui recommença la litanie de mes fautes. Quand les paroles ne suffisaient pas, il passait à des voies de fait. Je restais debout pendant de[s] heures, et si je donnais le moindre signe de fatigue, j’étais immédiatement battu. Ils m’obligeaient à fixer une paroi blanche et, si je fermais les yeux, ils me donnaient des coups sur la tête ou bien ils me cognaient la tête contre le mur. Ils me décrivaient ce qui arriverait à ma femme et à mes filles lorsqu’elles seraient sur le pavé.
« L’enquête dura ainsi pendant quatre-vingts heures sans qu’on me permît de prendre un peu de nourriture et de repos. Toutes les douze heures, les enquêteurs se remplaçaient. Les méthodes employées par eux devenaient de plus en plus cruelles. Epuisé physiquement et moralement, je ne résistai pas davantage et j’avouai tout ce dont j’étais accusé, à tort ou à raison. Je croyais mes tourments enfin terminés ; au contraire, on recommença à me faire des accusations nouvelles, exigeant de moi de nouveaux aveux (1732 — K. F., né en 1890.) » (6)

Certaines méthodes policières sont telles que jamais un policier « capitaliste » n’oserait les utiliser. Car là où existe la liberté de la presse l’arbitraire policier trouve sa limite. [...]

Tiré de L’U.R.S.S. CONCENTRATIONNAIRE : TRAVAIL FORCÉ ET ESCLAVAGE EN RUSSIE SOVIÉTIQUE, par GUY VINATREL, Chapitre V, pages 36 à 41, Éditions Spartacus, Juillet 1949.

TABLE DES MATIERES

Préface de Jean Rounault..... 5

INTRODUCTION..... 7

I. LA CONDITION OUVRIERE DE L’U.R.S.S..... 9

II. L’ISOLEMENT EST INDISPENSABLE AU REGIME STALINIEN..... 14
Qu’a donc à cacher le régime stalinien :..... 18

III. LA POLICE, PILIER ESSENTIEL DU REGIME SOVIETIQUE..... 21
Les dirigeants sont de formation policière..... 21
Le travail forcé base du régime..... 25

IV. LE TRAVAIL FORCE ET L’INDUSTRIALISATION DE L’U.R.S.S....... 28
Comment on se procure la main-d’œuvre..... 30
Des transferts par millions..... 33

V. LE MONDE CONCENTRATIONNAIRE SOVIETIQUE..… 36
Origine des témoignages..... 37
Entrée dans le monde concentrationnaire soviétique..... 39
Le billet d’admission individuel..... 43
Le billet collectif : la déportation en masse..... 48
Dante n’avait rien vu : Les convois de bagnards..... 54
Le criminel protégé concentrationnaire..... 61
Les conditions de vie..... 63
Les conditions sanitaires..... 70
Les femmes au travail..... 72
Le chantage par la faim : des chiens et des hommes..... 78
L’habillement et l’habitat..... 81
Les étrangers dans les camps..... 83
Etre sioniste est un crime..... 85
Combien y a-t-il de prisonniers en U.R.S.S. ?..... 86
Les camps : Russie d’Europe, Russie d’Asie..... 87
Le système concentrationnaire s’étend au glacis..... 93

VI. LIBERATION ? NON ! EXPLOITATION SANS MERCI, COLONISATION..... 96
L’U.R.S.S. nation de proie..... 97
L’Autriche au pillage..... 98
La Hongrie exploitée..... 99
Alliés ou vaincus : tous colonisés..... 102
Pourquoi Tito se rebella..... 103
Prostitution de la Bulgarie..... 103
Roumanie et Pologne en coupe réglée..... 105
Tous égaux sous la botte stalinienne..... 109
Misère en Hongrie..... 109
La Pologne toujours esclave..... 111
Le martyre des Etats Baltes..... 113

VII. DOCUMENTS ANNEXES :
1. Les camps existent..... 115
2. Un Français rescapé des camps de travail forcé..... 119
3. Un nouveau système de travail forcé..... 121
4. L’asservissement de l’esprit..... 123

— 

NOTES

(1) Ancien chef des services d’espionnage soviétique pour l’Europe Krivitsky avait refusé de faire exécuter un collègue dont il connaissait l’innocence. Traqué par la Guépéou il réussit, avant d’être assassiné à New-York en 1941, à raconter ans un livre introuvable, J’ai été un agent de Staline, comment le Vojd trafiquait de l’Internationale communiste contre les intérêts du prolétariat international. Faut-il dire que l’ouvrage fut retiré de la circulation par les Nazis en 1940 ? Entre complices...
(2) Au cours de sa présence en Italie, l’armée polonaise put faire imprimer une partie des témoignages des victimes de I’U.R.S.S. concentrationnaire. Ceux-ci sont rassemblés dans le livre La Justice Soviétique de Silvestre Mora et Pierre Zwierniak, Maggi et Spinetti éd., Rome 1944, à qui nous référons constamment tant est indiscutable l’authenticité des témoignages fournis.
(3) (Déclaration du témoin Kysilo, ingénieur mécanicien, à la cinquième audience du procès Kravchenko, d’après le compte rendu sténographique, page 28).
(4) Ernest Jucker, En pleine vie russe, page 269.
(5) La Justice Soviétique, page 216.
(6) La Justice Soviétique, page 219.

— 

PRÉFACE

J’ai été mécano, lampiste et médecin dans la ville de Makeevka (Donbass). J’y ai vu les forçats de Staline. Plus d’une fois mes camarades soviétiques m’ont demandé : est-ce que tu raconteras chez toi ce que lu as vu chez nous ? Je leur en ai fait la promesse. J’ai essayé de la tenir de mon mieux. Dans un livre qui porte le nom d’un de mes camarades (1), j’ai relaté fidèlement ce que j’ai vu et entendu en U.R.S.S. Et c’est en me fondant sur ma propre expérience que je vous dis : tout ce que Guy Vinatrel vous présente dans le livre que voici est vrai. Ayez le courage de le lire et d’y réfléchir. C’est rare le courage en France aujourd’hui. Très rare. C’est même ce qu’il y a de plus rare. Depuis mon retour, ce fait me frappe chaque jour. Le courage de penser, le courage de voir ce qui est, le courage de dire la vérité. Tous ces courages, je les cherche en vain. Tout le monde s’en fiche. C’est une attitude plus commode, c’est moins fatigant. Mais c’est l’altitude même de l’esclave. Il est vrai que de temps à autre on fait du bruit autour d’une question. Il a fallu attendre l’an 1949 pour que la grande presse ait bien voulu s’occuper de l’univers concentrationnaire soviétique. Oh, d’une façon bien bénigne en noyant la question dans des clichés à la mode. Beaucoup de bruit pendant quelques jours pour faire peur aux personnes qui aiment les sensations fortes. Puis, tout retombe dans le silence. Sans doute, David Rousset a eu raison de poser la question des camps russes. Il aurait encore mieux fait de poser la question du système qui a engendré ces camps, car l’univers concentrationnaire naît sans cesse du système stalinien comme la glace naît de l’eau. Il faut donc voir ce qu’est ce système. Il s’appelle communiste. C’est une imposture qui ne trompe que des philosophes de la classe Sartre-Merleau-Ponty. En réalité, le stalinisme est une société militaire, soumise à une discipline de fer où une classe de privilégiés exploite les ouvriers jusqu’à la mort. Le stalinisme n’a rien de commun avec le marxisme, le socialisme, le communisme. Il représente, à l’échelle de l’époque industrielle le système traditionnel des tzars en l’aggravant fortement. Les serfs, qui avaient été libérés, sont redevenus des serfs sous le nom de kolkhoziens. Les ouvriers, libres autrefois de faire grève et de se déplacer d’un endroit à l’autre, sont devenus des esclaves, attachés à leurs machines.

Ces ouvriers le savent et ils le disent. Ils citent le mot de Staline : l’homme est le capital le plus précieux. Oui, disent-ils, Staline est le plus grand capitaliste : 450 millions d’hommes.

Trente ans d’oppression n’ont pas fait perdre à nos camarades soviétiques le sens de la dignité humaine. Ils luttent dans une résistance passive de tous les instants contre le système, contre la classe des oppresseurs — les natchalniks. Il luttent en pratiquant la solidarité la plus absolue, en partageant leur pauvre boule de pain avec le premier camarade inconnu, ils luttent en affirmant contre le nationalisme impérialiste et chauvin du régime la fraternité internationale la plus absolue. Tous les requis pour le travail, tous les déportés étrangers, allemands, polonais, roumains, yougoslaves, lettons, etc. n’oublieront jamais cette solidarité-là. Ils savent que s’ils ont survécu à leurs épreuves, c’est à la solidarité fraternelle de leurs camarades soviétiques qu’ils le doivent.

Que font pendant ce temps-là nos amis d’Europe et d’ailleurs ? A chacun de répondre à cette question selon sa conscience.

J’ai dit qu’il faut du courage pour aller jusqu’au bout du livre de Vinatrel. Je souhaite à tous ceux qui prennent ce livre en main d’avoir la force d’aller jusqu’au bout. Je leur demande même de faire cet effort. Je le leur demande au nom de mon ami Vassia, au nom des millions de camarades soviétiques qui souffrent et luttent pour nous. Pour toi et pour moi, camarade. Et dis-toi bien ceci : Si nous avons encore la paix, nous la devons peut-être, en dernier lieu, à la résistance de nos camarades soviétiques.

Jean Rounault
Paris, le 30 janvier 1950.

— 

(1) Mon ami Vassia, Souvenirs du Donetz, Edition Sulliver, Paris.

— 

INTRODUCTION

Pour des millions d’hommes, pendant des années, l’U.R.S.S. a été plus qu’un espoir : une raison de vivre. Parce qu’ils croyaient alors que le socialisme se réalisait dans la sixième partie du monde, ils se battaient contre la bourgeoisie internationale sans faire ni demander merci. Tout était bon qui venait d’U.R.S.S., jusques et y compris sa Guépéou. C’était l’arme de classe des travailleurs et il n était pas question de porter le deuil pour quelques dizaines, quelques centaines, quelques milliers de cas d’injustice individuels. Dix têtes coupées tout de suite en épargnaient dix mille coupées plus tard.

Mais une tête coupée aujourd’hui, c’est dix demain, cent après-demain, dix mille bientôt, des millions plus tard. Et cela on ne le savait pas à l’époque. On était pour la défense de l’U.R.S.S. à tout prix, pour la lutte contre l’ennemi qui est chez nous, jusques et y compris le « social-traître », notre voisin, notre frère de classe… celui-là qui allait devenir notre frère d’armes. D’Amsterdam-Pleyel à l’O.N.U. il n’y avait qu’un pas, du pacte Laval-Staline qu’une glissade. Au fruit l’on juge l’arbre et nombreux furent ceux qui comprirent qu’il fallait reviser à fond les idées toutes faites.

Si l’U.R.S.S. était socialiste, nous n’étions sûrement pas socialistes. Si nous étions socialistes c’est qu’alors l’U.R.S.S. ne l’était pas. Mais qu’est-ce au juste que le socialisme ? Qu’il y a-t-il de commun entre le socialisme « quarante-huitard », humanitaire, collectiviste, communiste de nos grands-pères et ce socialisme « scientifique » planifié, concentrationnaire des staliniens ?

Est-ce que les « Soviets plus l’électricité » c’est vraiment le socialisme : Est-ce suffisant ? L’idéologie socialiste est-elle compatible avec la déportation massive de millions d’hommes pour extraire du minerai dans un endroit jadis désertique ? La transformation économique d’une société ne serait-elle donc que l’unique but du socialisme et peut-on dire qu’il est réalisé sur la sixième partie du monde parce qu’aucune réunion d’actionnaires ne distribue plus de dividendes ? Parce qu’aucun Paysan ne peut plus s’enrichir au point de salarier un voisin plus malchanceux pour accomplir une partie du labeur à sa place ? Et tout cela justifie-t-il l’encombrement des prisons et des camps, l’omnipotence d’une police devenue la clef de voûte de la société « socialiste ».

Nous savons très bien tout ce qu’a d’illusoire l’usage du bulletin de vote dans un régime économique à base capitaliste. Nous savons très bien ce qu’a de frelaté l’appellation dite « liberté de la presse ». Nous connaissons les limites vite atteintes du droit à la parole, du droit de réunion, du droit de grève : les théoriciens du socialisme « scientifique » nous ont si bien démontré la fragilité de la liberté en régime capitaliste, qu’au sortir de l’école primaire nos gamins en savent déjà long sur ce point. Mais nous savons aussi, par l’exemple de l’ilote soviétique, qu’une société qui fait fi de la liberté individuelle est une société invivable.

U.R.S.S. espoir du monde autrefois, aujourd’hui son cauchemar. Malgré la police, la terreur, la propagande, les révolutionnaires appointés, le rideau de fer, en dépit d’un obscurantisme soigneusement entretenu sur tout ce qui concerne l’U.R.S.S., la vérité s’est fait jour. Déjà des centaines de témoignages ont paru, les uns suspects, les autres indiscutables, qui apportent de l’U.R.S.S. une idée tellement différente de l’image officielle, que les points de vue en ont été modifiés fondamentalement : qui, en 1932 encore, aurait osé affirmer dans les cercles de militants révolutionnaires que la défense de l’U.R.S.S. ne surpassait pas tous les autres devoirs ? Combien se demandent maintenant, dans le fond du cœur ou publiquement, si la destruction de l’univers concentrationnaire soviétique n’est pas la tâche première du militant socialiste, celle qui conditionne son action pour l’émancipation des opprimés de ce temps.

C’est pour répondre à cette angoissante question que nous avons préparé cet ouvrage. Nous nous sommes effacé devant les témoignages. Notre choix n’est pas un choix arbitraire. Nous avons cherché les accents de l’authenticité et écarté ceux de l’antisoviétisme professionnel. Un séjour prolongé de l’auteur de ces lignes en U.R.S.S. nous a permis de le faire. Nous avons cité toutes nos sources et références et le lecteur pourra toujours se reporter aux témoignages cités.

L’U.R.S.S. concentrationnaire apparaît sous une lumière implacable. On s’aperçoit que la différence entre le fascisme et le « komfascisme » est une différence de détails et non une différenciation de caractères. Mais comme le Reich de mille ans n’a duré qu’une décade, l’U R.S.S. concentrationnaire un jour aussi trouvera sa fin. Et c’est alors que les hommes épris de paix et de liberté pourront enfin construire un monde de justice et de liberté, un monde socialiste.■


envoyé le 11 octobre 2022 Alerter le collectif de modération à propos de la publication de cet article. Imprimer l'article
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